Penetralia

Nous sommes venus hier soir à la maison du bord de l'eau. On comptait arriver aujourd'hui , mais "Bis... Fut..." ayant coloré notre trajet matinal d'un orange inquiétant nous avons décidé de prendre la route hier soir à 20 h ; arrivés à minuit : dodo ...et ce matin : vider la voiture, nettoyer le jardin, dépoussiérer la maison, et OUI en plus un bon bain dans ma mer si plaisante.|

Ce midi, je n'avais ni le temps, ni les ingrédients, ni -avouons-le - l'envie de préparer un repas; donc, j'ai proposé: "allons chez les filles ". Ce sont 2 filles qui vivent ensemble, travaillent ensemble, voyagent ensemble et qui tiennent un petit restau, dans notre coin du bord de l'eau: petit snack très simple, moules frites, spaghetti , salades diverses ...., juste de quoi se restaurer sans se prendre la tête ni se ruiner. Bon, c'est vrai, je n'y mangerais pas tous les jours, mais cela dépanne et en plus "les filles " sont des voyageuses qui adorent l'Afrique et peuvent nous apprendre maintes choses passionnantes sur ce continent que je ne connais pas. D'ailleurs, leurs murs sont tapissés de photos de leurs périples et franchement j'aime cette façon de partager . Aujourd'hui, elles étaient trop occupées par leur service et mon homme un peu trop pressé de faire sa sieste, je n'ai pas eu le temps de leur poser les questions qui me démangeaient sur les photos exposées cette année.... nous sommes là pour l'été et je peux les voir tranquillement le matin au bord de l'eau : il me reste du temps .

Il y a quelques semaines, j'ai -enfin!- m'a dit mon fils le dauphin, fait accorder mon piano . Il s'était tout simplement endormi depuis notre déménagement en 2006 , lui mécontent d'avoir été trimballé , même avec précaution, par les déménageurs , et moi pleine de maux de mains et de dos, prétextes ou bonne raison au silence.
Ces dernières semaines, entre le séjour au pays catalan, les congés de fils aîné, les préparatifs du voyage dans l'Ouest Américain, le nuage et l'annulation-report dudit voyage, je n'ai plus pensé au piano .
Et puis, hier matin, mon homme est parti faire sa sortie en vélo, je n'avais rien prévu avant l' aquagym programmée à 12 h; alors, j'ai ouvert le piano, quelques partitions et ce fut le réveil : un peu vaseux je dois le reconnaître , hésitant, mes mains sont gourdes. C'est dur !
En feuilletant les partitions je vois les dates inscrites par mon professeur de musique . Je réalise qu'une cinquantaine d'années ont passé depuis que j'ai étudié les sonates de Mozart, celles de Beethoven , les préludes, les valses et les études de Chopin . Emotion aussi en trouvant dans ces volumes les dates où ma Grand-Mère avait étudié ces pièces : 1894, 1896 ....Je me souviens comme elle jouait encore bien à 80 ans ! Et comme elle venait nous corriger quand elle entendait une fausse note : "do dièse ,là, dans ton accord "de sa voix douce et chantante....
C'est malin de repenser à tout cela , je me sens tout à coup cafardeuse et je referme le piano ....
Pourtant je suis bien décidée à m'y remettre. Je vais reprendre par des morceaux un peu faciles .Il faudrait aussi se tenir à jouer chaque jour, ne serait-ce qu'une 1/2 h . Voilà une bonne résolution pour occuper le temps rendu vide par l'annulation du voyage .
En fait déjà bien rempli: des amis s'annoncent pour ce soir et le week-end

Hier j'écrivais sur mes Petits potins du bord de l'eau que j'abandonnais Penetralia, car je ne parviens pas à le finaliser, j'en suis restée au bacasable.... Mais le sujet d'aujourd'hui ne me paraît pas convenir aux petits potins....

Beaucoup d'émotion, les larmes qui montent, je ne sais quelle chanson choisir pour dire mon immense peine : je regarde mes disques vinyles et CD de Jean Ferrat et je choisis celle là, que l'on entend rarement , extraite du disque de 1985 et qui est si actuelle:La porte à droite

Me revient le souvenir de la première fois où je l'ai vu sur scène, à Caen; j'étais étudiante (quelle année? entre 1962 et 1966, je devrais vérifier dans mes petits cahiers de l'époque ); il n'était pas une bête de scène, sa présence et son message étaient humains, tendres, amoureux . Sa voix, ses mots nous transportaient.... Et les années ont passé, son répertoire s'est étoffé, toujours engagé, résistant , honnête, poète; il a chanté ses propres textes, les poèmes d'Aragon que l'on a fait siens et nôtres . Que serai-je sans toi J'ai tout appris de toi jusqu'au sens du frisson me faisait me rapprocher de mon homme ...

Et ce midi , en écoutant Nuit et Brouillard à la radio, nous avions tous les deux les larmes aux yeux et la chair de poule.

Merci Monsieur Jean Ferrat.